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Yann Bouvier

Méditerranée du Futur, acte IV : l'essentiel de la conférence

Cette année, l’Acte IV de Méditerranée du Futur s'est déroulé le 1er décembre dans un format 100 % digitalisé en raison du contexte sanitaire.

Ce rendez-vous inédit a mêlé des visions très différentes et forcément complémentaires : le Professeur Didier Raoult et l’OMS, la directrice de l’hôpital de Bergame directement touché par la première vague et Stéphane Bancel, président français du laboratoire Moderna, sur le point de fournir un vaccin au monde entier. Le tout, sous l’égide de l’Union pour la Méditerranée, du Ministère de l’Europe et des Affaires étrangères, et avec la participation de Son Altesse Sérénissime le Prince souverain de Monaco.

Initiative unique en Europe, cet événement rassemble chaque année les autorités locales avec lesquelles la Région coopère, mais aussi les grands bailleurs, publics et privés, des intellectuels, des ONG et des personnalités politiques de haut niveau, autour de thèmes d’intérêt commun pour l’espace méditerranéen.

Après le climat, la jeunesse et l’investissement sur les deux rives, cette édition est revenue sur les trois siècles de pandémies qui ont marqué son histoire. 

Un centre de réflexion et d'action ouvert sur la Méditerranée et le monde

Les épidémies font partie intégrante de l’histoire du bassin méditerranéen. Quand on se penche sur ce que les plus grands experts ont écrit, on se rend compte que les épidémies ont façonné notre histoire. Elles créent des situations de crise à toutes les époques où elles apparaissent, elles poussent les peuples à s’unir face à un ennemi invisible, ou au contraire à s’entre-déchirer en espérant survivre.
Au regard des exemples passés, il est alors possible de comprendre comment un pays mobilise ses forces pour combattre la maladie. En cela, la Région Sud, véritable carrefour historique et culturel de la Méditerranée y tient une place centrale.
De la Grande Peste en 1720, qui a décimé en deux ans la moitié des habitants de sa capitale régionale, à l’épidémie du Covid -19, en passant par le choléra ou encore la grippe espagnole, Provence-Alpes-Côte d'Azur, à l’image du bassin méditerranéen, n’a pas été épargnée.
En effet, forte de son passé, Marseille, grand port de Méditerranée exposé au travers des siècles aux épidémies, a été lieu un lieu de développement d’une culture et d’une science propres dans ce domaine, la paléo-microbiologie, nouveau champ disciplinaire dont l’Institut Méditerranée Infection en est la structure de recherche la plus aboutie au XXIème siècle.
En s’intégrant progressivement aux recherches en anthropologie et en histoire, cette nouvelle discipline est venue renforcer la place de la Région Sud en tant que point de contact entre l’Europe et la Méditerranée.
A l’image de cette discipline, cette quatrième édition de Méditerranée du Futur a fait le choix d’analyser le présent à travers le prisme de l’histoire et rappelle que la Région Sud est un centre d’action et de réflexion unique en Méditerranée .

Acte IV : 1720 - 2020, de la peste au Covid, 300 ans de résistance aux pandémies en Méditerranée

Méditerranée du Futur s'est révélé être un moment particulièrement adapté pour que les acteurs du bassin méditerranéen puissent échanger sur le combat contre la maladie. Cet évènement est le plaidoyer pour les territoires et les élus qui les représentent, car ils sont au plus près de la réalité de terrain.
Il faut donner de l’espoir, des perspectives ! La crise du Covid -19 est venue bousculer les certitudes et invite à la remise en question. La Région Sud a, dès les premiers instants, déployé tous ses efforts et tous ses moyens pour atténuer les effets de cette crise sur le territoire régional.
Pour autant la réflexion doit se mener à un autre niveau, méditerranéen voire mondial. Les pandémies provoquent énormément de détresse car on ne voit pas la lumière au bout du tunnel. Cet événement permettra aussi d’allumer cette lumière, en mettant en valeur des témoignages, des avis et des expériences très différents. Cet espoir est capital lorsqu’on veut faire face à une épidémie.
En effet, les développements de cette crise démontrent bien, d’une part que chaque pays est frappé, en raison de la mondialisation et de la globalisation, qui génèrent une forte accélération des échanges, de la circulation des biens et des personnes, et, d’autre part, la nécessité de trouver des réponses coordonnées dans une démarche de coopération renforcée.

Une coordination entre Etats à revoir

Sur ce point, les intervenants l'ont répété d'une même voix : le monde n’était pas prêt pour affronter cette pandémie. Pour Son Altesse Sérénissime, le Prince Albert II de Monaco, "Nous devons croire plus que jamais en l'importance du dialogue, de la solidarité internationale et des partenariats pour renforcer les mécanismes de coopération internationale et assurer un avenir durable à tous." 
Pour Stella Kyriakides, commissaire européenne à la Santé, les écueils sont reconnus : "L’Europe doit mieux faciliter la coordination entre les différents États", a-t-elle admis. Alors que la crise a touché la planète entière, favorisant plutôt le repli qu’une coordination globale, Nasser Kamel, secrétaire général de l’Union pour la Méditerranée a rappelé aussi la nécessité de répondre au besoin "de justice sociale et de vivre ensemble", des pays les moins avancés. "Des actions fortes sont nécessaires pour que nous soyons tous mieux armés lors des prochaines crises : coopération sanitaire globale, renforcement des systèmes de santé et répartition équitable des médicaments et vaccins", leur répondait, en écho, le Dr Tedros Adhanom Ghebreyesus, directeur général de l’OMS.

Cette pandémie a bouleversé le visage de la Méditerranée

Partout autour du bassin, sur toutes les rives, le Covid-19 n’a épargné aucun pays, aucun territoire.
Cette pandémie a mis à jour des mots totalement inconnus, mais aussi des mots qu’on pensait réservés à des temps révolus ou des situations exceptionnelles :

  • Couvre-feu, Confinement,
  • Taux d’incidence, taux de positivité,
  • Indice de reproduction, cluster,
  • Masque chirurgical, FFP2, test antigénique, sérologique, PCR…

Ces mots font aujourd’hui partie du quotidien de plus de 6 milliards de personnes, alors qu’ils en étaient totalement absents il y a seulement un an !
Ce virus et les mots qui l’accompagnent ont un impact incroyable. Ils changent tout.
Ils bouleversent la vie, créent des contraintes nouvelles et différentes.
Ils changent le rapport à l’autre, ils créent des réflexes de protection et de repli.

Comme un rappel à la Méditerranée, ce virus amène son lot de discussions byzantines : quel est le meilleur moyen de le combattre ?
➢ Entre les partisans d’une immunité collective si difficile à atteindre,
➢ Ceux qui pensent qu’il faut toujours confiner, fermer et surtout ne jamais ouvrir,
➢ Ceux qui attendent impatiemment le vaccin, ceux qui le produisent, et ceux qui le contestent,
➢ Ceux qui pensent qu’il faut tester tout le monde d’un coup, et ceux qui pensent qu’il faut savoir anticiper et cibler.
➢ Et finalement tous ceux qui attendent la fin de la crise vides de certitude mais plein d’espérance.
Ce panorama de points de vue différents défile tous les jours sur les écrans.

Cet Acte IV de la Méditerranée du Futur aura justement proposé aux participants et au public, nombreux derrière ses écrans, de créer un discours franc, respectueux et honnête. 

La stratégie de la Région Sud pour l'avenir

Pour allumer cette lumière au bout du tunnel, la Région Sud met en place des outils qui guideront la stratégie des prochaines semaines.

1er outil - L’analyse des eaux usées pour avoir une semaine d’avance sur le virus !

Elle permet de savoir où les prochains clusters vont apparaître. Avec le Bataillon des Marins Pompiers de Marseille, la Région Sud déploie une cartographie régionale.

2ème outil – Le dépistage doit être rapide et accessible :

  • L'achat de165.000 tests antigéniques et sérologiques
  • Le cofinancement de11 machines de tests rapides PCR achetées pour les hôpitaux
  • Le lancement prochain d'une plateforme de mise en relation entre acheteurs et producteurs de tests antigéniques rapides

3ème outil – les auto-test salivaires

  • Ils permettront de rendre la vie sociale possible en attendant le vaccin
  • Le Président de la République les veut, mais leur certification tarde et il est impossible de les acheter aujourd’hui.

4ème et dernier outil – Faire de la Région Sud le QG opérationnel de la vaccination

  • L’Allemagne a 3 semaines d’avance sur sa stratégie et associe les territoires
  • Les Territoires Unis proposent leur aide et demandent à être associés à la stratégie

Le vaccin, l'autre motif d'espoir

Stéphane Bancel, Président-Directeur Général de l'entreprise Moderna, était invité à s'exprimer sur les travaux réalisés par la société américaine sur le futur vaccin. Pour ce Marseillais de naissance, "le vaccin c'est la lueur au bout du tunnel. D'ici juin, on devrait avoir la plupart des adultes qui veulent un vaccin qui auront été vaccinés et en septembre prochain, à mon avis, la rentrée des classes sera normale."

Concernant la technologie utilisée, celle à ARN messager, Stéphane Bancel explique que "le plus dur a été de développer la technologie sans effet secondaire sur l’homme. Cela nous a pris trois ou quatre ans. Puis, depuis 2015, nous avons procédé à des essais cliniques sur neuf vaccins", a-t-il rappelé. En vulgarisant, il poursuit : "La biologie moléculaire se résume à un alphabet de quatre lettres. On ne vous injecte pas le virus mais une protéine que va reconnaître le système immunitaire, qui va produire des anticorps en reconnaissant cette protéine. Quand le virus du Covid- 19 est arrivé, nous avons pu aller très vite. Car ce qui change entre le vaccin contre Zika ou le vaccin contre Covid-19, c’est l’ordre des lettres".

 

300 ans après la peste, la paléomicrobiologie au coeurs des travaux de recherche de l'IHU

En parallèle, le colloque annuel de l'IHU Méditerranée avait également pour théâtre l'acte IV de Méditerranée du Futur. 
En 1720, Marseille était frappée par la dernière grande épidémie de peste en Europe. Confrontée aux épidémies, la ville s’est dotée d’outils pour se protéger de la contagion. Les chercheurs de l' IHU Méditerranée se servent aujourd'hui de ces différentes épidémies dans le cadre de leurs travaux de recherche. 

Pour le docteur Michel Drancourt, Directeur adjoint de l'IHU, "les connaissances acquises en analysant rétrospectivement les épisodes anciens permettent de mieux comprendre les dynamiques des épidémies. Différentes expertises et spécialités sont associées pour cette analyse. La peste est toujours active. C'est une maladie d'écosystèmes. Les animaux y jouent un rôle important, et le sol est peut-être, selon certains travaux, une source d'infection pour les animaux. Une grande partie des travaux d'anthropologie sur la peste ont été effectués dans notre région. Ce n'est pas par hasard car Marseille était la porte d'entrée de la maladie. Aujourd'hui, la paléomicrobiologie de la peste nous permet de mieux comprendre la dynamique de l'épidémie à Marseille en croisant les différentes disciplines : histoire, anthropologie, biologie, informatique. C'est notamment le cas grâce à l'analyse de la pulpe dentaire, système inventé par l'IHU et les équipes du Professeur Raoult, qui a permis de prouver que les squelettes anciens contenait le virus de la peste. C'est une première mondiale."

Qu'est ce que c'est, la paléomicrobiologie : l’objectif de cette discipline est de traquer les traces de maladies dans les restes humains et animaux de plus de cent ans. Des équipes de scientifiques marseillais ont ainsi posé leurs microscopes sur les restes de défunts frappés par la peste de 1720 et retrouvés sur des chantiers de fouilles.

Retrouvez le replay sur www.mediterraneedufutur.com 

L'aftermoovie de l'acte IV