Un phénomène d'une triste actualité dans notre région
Après le procès d’Aix-en-Provence en 1978, qui a permis la criminalisation du viol grâce à l'engagement de l’avocate Gisèle Halimi, une autre affaire judiciaire au retentissement mondial a récemment marqué notre région. Le procès dit « des viols de Mazan », et la levée du huis-clos à la demande de Gisèle Pélicot, a provoqué une prise de conscience nationale et internationale sur la soumission chimique et les violences sexuelles y étant associées.
Chaque jour, pendant les 3 mois de procès, Gisèle Pélicot a été accompagnée par l’association AMAV- France Victimes 84, partenaire majeur de la Région au titre de la Convention Justice. Ce faisant, au plus près de l’effroyable réalité mise en lumière durant le procès, la Région a souhaité mobiliser les moyens nécessaires dans la lutte contre la soumission chimique afin de faire s’engager l’ensemble des partenaires du monde associatif et économique.
La Région Sud s'engage contre la soumission chimique en mobilisant tous les acteurs
Dès 2025, une large concertation s’est engagée avec le ministère de la Justice, les services de l’Etat, les services judiciaires, les forces de sécurité, les établissements de soins, les acteurs associatifs, les acteurs économiques et les professionnels du droit. Tous étaient volontaires pour créer un élan commun à même de répondre aux enjeux de sensibilisation, formation, détection et protection.
Parallèlement, un travail important a été mené en collaboration avec Sandrine Josso, députée de Loire-Atlantique et en charge d'une « mission intergouvernementale sur la soumission chimique comme violence faite aux femmes ». Mme Josso a porté plainte contre le sénateur Joël Guerriau en 2023, l'accusant de tentative de viol par soumission chimique.
Enfin, la Région a initié de nombreuses rencontres avec les professionnels du territoire : médecins, universitaires, laboratoires de toxicologie, sociétés savantes... afin de préparer une mise en réseau développée et structurée sur tout le territoire régional.
Le 18 novembre, le Forum "Respect pour les Femmes", organisé à l'Hôtel de Région à Marseille, aura pour thème "Pour en finir avec la soumission chimique". A travers différents ateliers, interventions et témoignages, l'objectif est de braquer les projecteurs sur ce phénomène malheureusement encore trop répandu.
Entretien avec Joëlle Micallef, directrice du centre d'addictovigilance Provence-Alpes-Côte d'Azur
La soumission chimique, selon la définition de l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM), consiste en « l’administration à des fins criminelles ou délictuelles de substances psychoactives à l’insu de la victime ou sous la menace ». Pour lutter contre ce fléau, plusieurs dispositifs de surveillance pharmacoépidémiologiques sont mis en place, comme celui de l’Assistance Publique-Hôpitaux de Marseille (AP-HM).
Joëlle Micallef, médecin et professeur de médecine, dirige le centre d'addictovigilance pour les régions Sud et Corse. Actif depuis plus de 30 ans, ce centre surveille et analyse l’usage des substances psychoactives et leurs effets sur la santé, qu’il s’agisse de conduites addictives liées à des médicaments ou d'autres substances, ainsi que de leur détournement pour divers usages, notamment dans le cas de soumissions chimiques.
Depuis quand ce phénomène de soumission chimique est-il suivi ?
Joëlle Micallef : La soumission chimique a été mise en lumière dans les années 1980 par le professeur Jacqueline Jouglard, qui a remarqué les premiers cas d'enfants soumis à des substances sans leur consentement. Ce phénomène existe donc depuis longtemps, mais ce n’est qu'en 2003 que l'Agence du médicament a structuré son suivi et posé le terme de « soumission chimique ». Souvent, pour qu'on sache quand les choses commencent, il faut leur donner un nom. C’est presque du marketing mais comme ça tout le monde parle le même langage, même si le phénomène existe depuis longtemps.



